Ousmane Sy Ndiaye, Directeur Exécutif de l’UNACOIS JAPPO : « Les conditions primaires d’une relance économique réussie sont à co-construire de concert par l’Etat et la PME »
La pandémie de COVID-19 est un ennemi qui a causé beaucoup de pertes au monde des affaires. Pour réduire ses capacités de nuisance sur l’économie et les entreprises, et remettre en marche le moteur de la relance économique, l’Etat et le secteur privé doivent conjuguer leurs efforts. Tel est, en tout cas, le message qui transparaît dans les propos du directeur exécutif de l’UNACOIS JAPPO. Pour Ousmane Sy Ndiaye, les conditions primaires d’une relance économique réussie sont à co-construire de concert par l’Etat et la PME.
La pandémie de COVID-19 a mis à genoux plusieurs secteurs d’activités. Quelle lecture en faites-vous ?
« Vous avez eu raison de dire que la pandémie de COVID-19 a mis à genoux presque tous les secteurs d’activités de la vie économique. Il en est ainsi en Afrique, dans le monde et notamment dans les pays développés et les pays émergents. C’est la première fois, pour ma génération, qu’une crise sanitaire d’une telle ampleur s’abatte quasi simultanément sur toute la planète avec son lot de difficultés . . .
Fortement impactés dans leur ensemble, les secteurs d’activités et les entreprises risquent de mettre beaucoup de temps à se relever du choc violent et surprenant du Coronavirus. Du secteur du commerce au tourisme, en passant par les transports, les BTP, l’agriculture et l’artisanat, aucune entreprise n’est épargnée et non plus n’a su profiter de la première génération de mesures gouvernementales de soutien pour renforcer sa résilience.
Dès lors, que faudrait-il asseoir comme stratégies pour la relance de l’économie ?
A priori, je ne vois aucune issue économique heureuse du pays en dehors d’un diagnostic approfondi de l’impact de la pandémie sur le fonctionnement des principaux secteurs d’activités, susceptible de mesurer avec objectivité l’ampleur des dégâts causés par les effets de ladite pandémie. Cette démarche, quand bien même nécessaire pour établir une situation économique de référence, me paraît insuffisante à elle seule pour aborder la relance. Il faudra, en plus, s’occuper enfin de la formalisation de l’économie « informelle » dans une démarche de restructuration et de modernisation des modes opératoires des entrepreneurs concernés. En somme, le salut de notre pays et des pays africains, en général, passera inévitablement par la modernisation de l’économie à travers un environnement juridique et fiscal repensé et réadapté au contexte du pays d’une part, et une nette amélioration des conditions d’accès aux marchés et au financement notamment bancaire des PME, d’autre part. Cette approche aura l’avantage de placer notre pays dans une perspective de création d’un tissu économique viable et durablement résilient. Le secteur informel est réputé pour la vulnérabilité de ses acteurs. Les conditions primaires d’une relance économique réussie sont à co-construire de concert par l’Etat et la PME.
En votre qualité de directeur Exécutif d’une organisation patronale, quel est le principal enseignement à tirer de cette crise au plan économique ?
L’enseignement majeur de cette crise au plan économique réside, de mon point de vue, dans l’urgence de créer les conditions d’un développement endogène en vue de vaincre la dépendance économique. Quand dans un pays, l’essentiel des biens de consommation courante est importé, il y a lieu de s’inquiéter sur son devenir économique et sa stabilité sociale. La préservation et le développement des emplois notamment des jeunes (frange la plus importante de la population) soutenus par des investissements productifs massifs, portés pour l’essentiel, par un secteur privé national fortifié par l’Etat, est l’un des canevas par lesquels les politiques publiques doivent être élaborées ; leurs finalités étant de garantir le bien-être des Sénégalais. Systématiquement, ces deux acteurs clés de notre système économique devront dorénavant apprendre à travailler ensemble, c’est-à-dire partager le même cadre de réflexion et d’élaboration des stratégies publiques et de convenir des modalités de leur mise en œuvre dans une perspective de croissance inclusive. La pandémie du Coronavirus a fini d’installer les pays dans une posture de concentration de leurs activités. Les exportations risquent d’en prendre un sérieux coup et les risques d’accès à l’alimentation restent plus que jamais importants. Dans cette hypothèse, la voie la plus sure et responsable est de bâtir ses stratégies de relance sur la base de son propre potentiel économique.
Joseph SENE