Rapatriement des recettes d’exportations : Le Sénégal avant-dernier de l’UEMOA

La Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Dakar (CCIAD) ont organisé la première rencontre semestrielle de 2024 entre l’Institution monétaire et les représentants des organisations patronales. Deux points essentiels étaient à l’ordre du jour : les dispositions du règlement N°09 concernant les obligations des opérateurs économiques en matière de rapatriement des recettes d’exportations et la question de la pression fiscale et du développement des entreprises. D’après les chiffres de la BCEAO, le Sénégal présente un défaut de rapatriement de 704 milliards de francs CFA.

Sous la direction de la CCIAD, plusieurs organisations patronales ont participé à cette rencontre d’échanges entre le Directeur national de la BCEAO pour le Sénégal et le secteur privé national. Il s’agit de la première rencontre en présentiel depuis la pandémie de COVID-19, a souligné François Sène, nouveau Directeur de la BCEAO pour le Sénégal, succédant à Ahmadou Al Aminou Lo, qui a été nommé nouveau secrétaire général du Gouvernement.

Défaut de rapatriement des recettes d’exportations

La présentation de la BCEAO a révélé un défaut de 704 milliards de francs CFA dans le rapatriement des recettes d’exportations du Sénégal. À fin mars 2024, le Sénégal affichait un taux de rapatriement de 64 %, le plaçant ainsi avant-dernier parmi les pays de la zone UEMOA, selon François Séne.
Ce constat est préoccupant, d’autant plus que le Sénégal est la deuxième économie de l’Union après la Côte d’Ivoire, qui atteint un taux de 95 %. Ce manque à gagner pour l’économie nationale doit être corrigé, puisque cette contre-performance affecte négativement le pool commun des devises de l’UEMOA.
François Sène a précisé que, bien que les banques aient fait des progrès considérables en respectant les réglementations à plus de 80 %, les entreprises restent à la traîne. Il a ajouté que le déficit commercial du pays s’élève à plus de 3 000 milliards de francs CFA.
Du côté du secteur privé, on relativise la situation en mettant l’accent sur l’identité des exportateurs. Selon de nombreux intervenants, les entreprises étrangères qui opèrent depuis le Sénégal préfèrent conserver leurs devises dans d’autres pays. Modou Thiam, membre de la Confédération Nationale des Employeurs du Sénégal (CNES), a indiqué que les plus grandes entreprises exportatrices sont contrôlées par des étrangers.
Les participants ont plaidé pour que les secteurs stratégiques soient contrôlés par des investisseurs nationaux. Abdoulaye Ly, directeur exécutif du Club des Investisseurs du Sénégal (CIS), a souligné que « le caractère informel de l’économie est désaxé par rapport aux règles prudentielles. » Il a invité la BCEAO à « s’intéresser davantage aux secteurs réels de l’économie » pour mieux sensibiliser les acteurs sur leurs obligations.

Pression fiscale sur les entreprises

Les discussions sur la fiscalité des entreprises ont permis à la BCEAO de recueillir les perceptions du secteur privé concernant la pression fiscale. Si certains estiment que le paiement des impôts est nécessaire pour les entreprises, les représentants des organisations patronales demandent un élargissement de l’assiette fiscale pour réduire le taux d’imposition.
Ces opérateurs économiques invitent les régies financières à accompagner les entreprises pour qu’elles se conforment aux obligations fiscales. Selon Babacar Diagne, président du Conseil des Entreprises du Sénégal (CDES), seules 2 % des entreprises disposent d’états financiers. Il plaide pour la création de comités de facilitation entre la Direction Générale des Impôts et des Domaines (DGID) et le secteur privé.

Un cadre de concertation avec les régies financières

Mame Thierno Diop, représentant de l’Association des Commerçants et Industriels du Sénégal (ACIS), suggère que l’État allège les impôts pour encourager la formalisation des entreprises du secteur informel.
Abdoulaye Ly s’est félicité de la décision des nouvelles autorités de réviser le Code général des Impôts. Dr Mbaye Chimère Ndiaye, secrétaire général de la CCIAD, a souligné les difficultés rencontrées par de nombreuses entreprises en raison du blocage de leurs comptes via des ATD (Avis à Tiers Détenteur). Il propose la mise en place d’un cadre de concertation entre la DGID et le secteur privé, comme l’a fait la Douane.
En ce qui concerne les recours hiérarchiques, il pense que les entreprises devraient être représentées au sein de l’organe chargé d’arbitrer les contentieux.
Le directeur national de la BCEAO pour le Sénégal a promis de transmettre les observations et suggestions aux autorités. Il a indiqué que les échanges entre l’Institution monétaire et le secteur privé auront désormais lieu chaque semestre.

Sanou BADIANE

Papa Code NDOYE

http://bie.cciad.sn

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